L’actrice Isabelle Adjani jugée en son absence pour fraude fiscale
L'actrice aux cinq Césars, Isabelle Adjani a été jugée jeudi 19 octobre à Paris en son absence pour fraude fiscale aggravée et blanchiment, une affaire dans laquelle le tribunal se prononcera le 14 décembre.
Le « prêt d’un ami« , une « erreur« , ou une volonté de « faire illégalement des économies sur ses impôts » ? L’actrice Isabelle Adjani a été jugée jeudi 19 octobre à Paris en son absence pour fraude fiscale aggravée et blanchiment, une affaire dans laquelle le tribunal se prononcera le 14 décembre.
Le parquet national financier (PNF) a requis contre elle 18 mois de prison avec sursis probatoire et 250 000 euros d’amende, avec exécution immédiate, ainsi que deux ans d’inéligibilité. La défense a plaidé la relaxe, répliquant par une version « aux antipodes » de l’accusation.
Des économies « sur ses impôts » pas « sur son train de vie »
L’audience s’est étirée jusque tard dans la soirée sans l’actrice et chanteuse de 68 ans qui se trouvait aux Etats-Unis. Sa défense a demandé le renvoi du procès en invoquant notamment une « pathologie aiguë » mais le tribunal a rejeté cette requête, affirmant douter de « l’intention réelle » de l’actrice de venir à la barre.
La présidente a longuement retracé, dans une salle presque vide, l’enquête ouverte en 2016 après l’apparition du nom d’Isabelle Adjani dans les Panama Papers. Des révélations qui n’ont finalement mené à aucune poursuite, mais mis au jour d’autres soupçons. « Sa célébrité n’a été ni une raison supplémentaire, ni un obstacle aux poursuites. Avant d’être une personnalité publique, elle est une citoyenne soumise à des devoirs« , a assuré le procureur financier en débutant son réquisitoire.
Isabelle Adjani « a cherché, de façon assez systématique, à diminuer son imposition entre 2013 et 2017 et, au lieu de faire légalement des économies sur son train de vie (…) elle a choisi de faire illégalement des économies sur ses impôts« , a tancé le magistrat. Pour l’accusation, l’actrice avait bien son foyer principal, son activité professionnelle et ses centres d’activités économiques en France, et non au Portugal, en 2016 et 2017 : elle aurait donc dû payer 236.000 euros d’impôt sur le revenu dans l’Hexagone.
« Donation déguisée »
En outre, selon le parquet financier, les deux millions d’euros versés en 2013 par l’homme d’affaires sénégalais et membre du Comité international olympique Mamadou Diagna NDiaye n’étaient pas un prêt, mais une « donation déguisée« . Le contrat de prêt signé entre eux, qui ne comprenait ni intérêt, ni garantie, était « fictif » et a permis à l’actrice d’éluder 1,2 million d’euros de droits de mutation, ont soutenu les procureurs.
Le parquet national financier a enfin demandé à ce qu’elle soit reconnue coupable de blanchiment pour avoir reçu depuis une société offshore 119 000 euros sur un compte bancaire américain « non déclaré« , une somme ensuite transférée au Portugal.
L’un des avocats de la défense, Stéphane Babonneau, a retracé le parcours d' »une des plus grandes actrices françaises« , estimant que « non, Isabelle Adjani n’a pas été traitée comme un justiciable ordinaire« . « Quoi qu’elle fasse, elle a tort ! » s’est-il indigné, dénonçant les « procès d’intention » et les « croyances » de l’accusation. Il a affirmé que « tout était parti » de 2013, année où s’était mise en place « une spirale » pour l’actrice : sa société Isia Films a alors été « vidée de 800 000 euros » du fait d’une « escroquerie« , la société visée par un « redressement » comme Isabelle Adjani « à titre personnel« .
« Confiance trahie »
« Dans un contexte de détresse financière très importante« , « en dépression« , elle a « trouvé de l’aide » auprès de son « ami » Mamadou Diagna NDiaye, le « parrain de cœur » de son fils, via un « prêt déclaré » qu’elle avait « 10 ans » pour rembourser, a soutenu l’avocat.
Concernant sa résidence fiscale, « elle s’est trompée parce qu’elle a suivi les conseils qui lui ont été donnés« , a assuré le conseil, rappelant qu’elle avait payé les sommes dues via une transaction avec le fisc. L’avocat a en outre fait valoir que les 119 000 euros avaient été virés par « son avocat genevois » et utilisés « pour faire un don à la famille de sa gouvernante, pour qu’elle puisse acquérir un bien au Portugal« . « C’est quelqu’un qui fait confiance et qui voit sa confiance trahie, ce n’est pas du tout quelqu’un qui va chercher à frauder« , a ajouté Me Olivier Pardo, estimant que l’audience, « sans Isabelle Adjani, sans M. NDiaye, impose la relaxe« .